POUR INCAPACITE OU MAUVAISE FOI DE LA MAIRIE Le lycée public de Fourou au bord du gouffre
Il y a plus d’un mois de cela, les élèves orientés au lycée de Fourou sont privés de leur droit à l’éducation, un droit reconnu et garanti par la constitution et les conventions internationales ratifiées par le Mali. La cause : le transfert du lycée à la collectivité locale.
Décidément, depuis la fermeture des conseils de cercle et l’annonce de transfert des lycées aux collectivités de base, plusieurs observateurs avertis ont montré leurs inquiétudes quant à la bonne prise en charge de ces établissements. L’histoire serait-elle en passe de leur donner raison ? En tout cas, ce qui se passe à Fourou aujourd’hui illustre parfaitement la situation. Beaucoup d’établissements commencent déjà à vivre le calvaire à cause de ce transfert. Certains proviseurs préfèrent les conseils régionaux, pourtant plus éloignés que les mairies. C’est le cas d’ailleurs du proviseur lycée de Fourou, M. Nouhoum Bamba, un cadre intègre et très soucieux de la formation des enfants de Fourou.
En effet, depuis le 15 février dernier, les cours presque à l’arrêt au lycée de Fourou, à cause d’une cessation de travail initiée par les enseignants vacataires intervenant dans cet établissement il y a plus de quatre ans. Ces vacataires, sans salaires pour la plupart, demandent au proviseur le paiement de leurs honoraires du premier trimestre de 2023/2024. Le paiement, habituellement fait par le Conseil de conseil de cercle, devait l’être par la maire qui gère le lycée depuis janvier dernier.
Le maire, saisi par le proviseur, refuse catégoriquement le paiement de ces dus, malgré l’intervention du sous-préfet, Mme Samaké Germaine Togo. Pour le cercle de Kadiolo, le préfet Bakary Dioman Diakité était le seul espoir des élèves de Fourou. Malheureusement, ce dernier s’en est lavé les mains, comme s’il était en complicité avec le maire. D’ailleurs, le constat a été fait par un vacataire qui a requis l’anonymat, lors de l’une des récentes tournées du préfet à Fourou.
Pire, la même personne a ajouté que le patron de Kadiolo les a obligés de reprendre ces heures, lors d’une rencontre en 2023. Une rencontre au cours de laquelle le maire s’était engagé à payer intégralement ces heures, dès que le transfert de compétences se fera entre le conseil de régional et la mairie, prévu en janvier 2024. C’était lors du dénouement d’un autre mouvement de grève.
Pourquoi le maire refuse de payer les heures supplémentaires ?
Ousmane Ouattara, maire de la commune de Fourou, est seul à répondre cette question. Du moment où cette collectivité est enviée par toutes les autres du Mali à cause des nombreuses recettes que génèrent les mines d’or installées dans la commune, Ousmane Ouattara, enseignant du fondamental à la retraite, devrait penser à l’avenir des enfants de Fourou et sortir de ce bras de fer avec la direction du lycée, dirigée par des professeurs principaux. De toutes les façons, ce n’est pas par manque d’argent qui explique cette situation, mais plutôt la mauvaise foi du maire.
Pour preuve, selon le rapport 2020 -2021 de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (Itie), présenté le mercredi 18 octobre 2023 à la préfecture de Kadiolo, le secteur minier fait des transferts de patentes et de vignettes aux collectivités locales. Quant à sa contribution dans le budget des collectivités locales, la commune rurale de Fourou, en 2021, a reçu en patentes 577 757 017 francs CFA et le conseil de cercle de Kadiolo, 229 640 020 francs CFA. Ces montants qui s’augmentent chaque année n’ont pas permis au maire de faire de cette petite commune un eldorado. La commune reste un désert, sombre où il demeure toujours difficile de se servir en eau potable. Sans risque de se tromper, l’or de Fourou ne brille pas pour les populations de la commune. A titre de rappel, il y a plus de deux années scolaires, sur demande du lycée de Fourou et par l’intermédiaire du maire, l’établissement devrait bénéficier de l’électricité venant des mines de Syama. Malheureusement, à la grande surprise générale, le câblage de fil s’est terminé à la concession du maire, à ou 300 ou 400 mètres du lycée. Ce branchement devrait permettre de soutenir la direction du lycée, le village n’ayant pas d’électricité. Pire, en décembre dernier, le maire aurait refusé de prêter sa machine de reprographie à la direction du lycée pour la multiplication des sujets des compositions du 1er trimestre.
Faut-il le rappeler, le lycée public de Fourou a été vidé de ses professeurs il y a plusieurs années à cause des mutations sauvages et irréfléchies de certains enseignants dans les départements de l’Education et de l’Administration territoriale. Ce qui fait de cet établissement un lycée sans professeurs de lettres, des sciences de la vie et de la terre, des arts, du droit, du dessin technique. Le départ de ces vacataires entrainera la fermeture des deux filières, à savoir la terminale science expérimentale et la terminale arts-lettres.
Aujourd’hui, les autorités en charge de l’éduction sont plus que jamais interpellées à recadrer ces genres de situation. Si tous les maires se comportaient de la sorte, les problèmes de l’éducation iraient de mal en pis. Chose qui assombrira l’avenir de nos enfants et compromettra le développement du pays.
N’Golo Coulibaly