Le rapport provisoire d’audit du secteur minier l’a révèle : “Seules 5 sociétés minières ont versé des dividendes à l’Etat sur les dix dernières années”
L’information a été donnée au cours d’un point de presse organisé par le Front pour l’émergence et le renouveau au Mali (Fer-Mali) et l’Association pour la promotion et la valorisation des ressources minérales au Mali (APVRM) afin de soutenir le gouvernement dans sa volonté d’assainir le secteur minier du Mali. Aussi, les deux organisations ont encouragé le gouvernement à diligenter la finalisation du rapport d’audit du secteur minier qu’il avait commandité. La conférence était principalement animée par le président de l’APVRM, Djibril Diallo. Il avait à ses côtés, le président de Fer-Mali, Sory Ibrahima Traoré, et Pr. Dalla Konaté.
Dans ses mots de bienvenue, le président de Fer-Mali, Sory Ibrahima Traoré a rappelé l’importance du secteur minier pour notre économie, regrettant que nonobstant cette importance capitale, celui-ci échappe complètement au contrôle de l’Etat. Selon lui, cet audit sert désormais de preuve que les mines d’or opèrent dans l’opacité totale. A sa suite, Pr. Dalla Konaté a évoqué l’impact de cet audit sur l’exploitation aurifère dans notre pays. La relecture du Code minier de 2019 figure parmi les recommandations fortes.
Le président de l’APVRM, Djibril Diallo, a salué le patriotisme et l’engagement des membres de Fer-Mali et l’APVRM qui, depuis plus d’une année, ont réclamé une meilleure gouvernance des exploitations minières du Mali pour que l’or du Mali puisse briller pour l’ensemble des Maliens.
“Depuis plus d’une année, nous avons soutenu que l’exploitation de l’or du Mali échappe au contrôle du gouvernement malien pour plusieurs raisons”, a-t-il souligné.
En effet, dira-t-il, suite à de multiples sollicitations des forces vives de la nation et conformément aux recommandations des Assises nationales de la refondation, le gouvernement du Mali a commandité un audit du secteur minier malien qui a été accueilli avec espoir par l’ensemble des acteurs du secteur minier malien. “Nous adressons nos sincères félicitations aux autorités de la Transition pour ce courage politique qui permettra à coup sûr d’assainir un secteur aussi stratégique et vital pour la souveraineté économique et politique de notre pays”, a-t-il ajouté. A ses dires, bien que notre pays soit l’un des plus grands producteurs d’or au monde et troisième producteur africain pendant des décennies, le Mali ne dispose d’aucune réserve d’or et reste l’un des plus pauvres au monde, la gouvernance de l’exploitation des ressources minières dans notre pays est caractérisée par une opacité criminelle, les retombées économiques des dépenses d’exploitation des ressources minières du Mali échappent aux opérateurs économiques maliens donc à l’économie nationale du Mali, l’or du Mali est exportée de manière brut et raffiné dans des conditions opaques à l’extérieur du Mali.
A l’entendre, douze des quinze mines d’or industrielles du Mali affirment fonctionner à perte donc ne versent aucun dividende à l’Etat du Mali et certaine mine ont pu faire 15 ans d’exploitation sans payer de dividendes à l’Etat, à cause des clauses particulières de leur contrat et certains responsables continuent de dire que les contrats ne sont pas négociables au Mali.
Evoquant le contenu du rapport provisoire d’audit des mines du Mali, il dira que le rapport mentionne que près de 2600 milliards de F CFA n’ont pas été rapatriés en produits d’exportation de l’or de 2019 à 2021, donc cette financière échappe à l’économie malienne, au système bancaire de notre pays et elle est contraire à la loi en matière d’exportation. Et de noter que le rapport indique qu’en 2021 sur un chiffre d’affaires de près de 1900 milliards de F CFA, seulement 60 milliards de dividendes ont été versés à l’Etat du Mali qui a aussi accordé une exonération de 36 milliards de F CFA. Il ajoutera que certaines sociétés minières en exploitation depuis plus de dix ans n’ont jamais versé de dividende à l’Etat du Mali.
Aux dires de M. Diallo, le rapport révèle également que seules trois sociétés minières ont versé des dividendes à l’Etat du Mali en 2021 ; sur les dix dernières années seulement cinq sociétés minières ont versé des dividendes à l’Etat du Mali ; une société minière sur place n’a pas versé de dividendes pendant quinze années d’exploitation consécutive ; pour un chiffre d’affaires de 1904 milliards de F CFA en 2021 seulement 3 milliards ont été investis dans le développement communautaire, certaines sociétés minières n’ont même pas mis en place un budget pour le développement communautaire, soit 0,15 % du chiffre d’affaires. Alors que ce taux est de 1 % au Burkina et 0,5 % en Guinée.
Pour le conférencier, en plus ce montant est dépensé par les sociétés elles-mêmes au Mali. Et de poursuivre que le rapport d’audit a constaté que : le fonds minier de développement local n’est pas fonctionnel au mépris des dispositions légales en République du Mali ; le déversement de près de 32 millions de tonnes de boue dans la carrière de Morila est en train peser sur l’avenir de cette mine, car cela a pu condamner près de 100 tonnes d’or et pourtant les sociétés qui ont fait ces pratiques ont encore des intérêts dans ce pays ; beaucoup de sociétés exploitent leurs minerais sans investir dans une usine et créer des emplois, or ces sociétés bénéficient des avantages du code minier ; beaucoup de sociétés ont réussi à faire des modifications dans leurs contrats pendant les 30 dernières années et restent sur les anciens codes miniers plus juteux. Fort du rapport de l’audit des mines du Mali et en attendant les réponses diligentes des sociétés auditées, nous constatons que toutes les revendications de Fer-Mali et l’APVRM ont été prise en compte par ledit rapport. “Nous demandons au gouvernement du Mali de diligenter la finalisation du rapport d’audit dans un cadre participatif garantissant les droits de toutes les parties prenantes afin que l’or du Mali brille enfin pour les maliens”, a-t-il conclu.
Boubacar Païtao